Bonjour
à toi. Tu m’as manqué. Je voulais
t’écrire, mais je n’ai pas senti cet appel des profondeurs, cette étincelle
fugace, ce séisme du Génie qui m’ébranle comme un séisme arménien tous les 6
mois, quand je bois 1 litre de Nescafé Leader Price, avec Misty d’Erroll Garner
à fond dans les tympans, fumant des Lucky dans mon lit monastique en caleçon
Zara, en attendant que se produise sur mon laptop cet ouragan démiurgique et
prométhéen, que la dictée de Dieu tombe sur moi comme un Poltergeist dans un
Maelström, que mon Doppelgänger le blogueur saisisse le Zeitgeist avec une
légère Schadenfreude, et m’inspire ce post fulgurant qui retentira comme
l’éclair dans la brume forestière d’Ettlingen (Baden-Württemberg). J’attendais
avec une passivité procrastinatrice ces bouffées de self-empowerment, quand
retentit sur l’écran mon cri intérieur, plus fort que le brame du cervidé dans
la commune voisine de Bad Herrenalb (Forêt Noire).
Je ne
t’ai pas entendu non plus me supplier à genoux de revenir sur cette scène
cybernétique où je me suis
tant exposé aux quolibets d’une foule vagissante de
cliqueurs blasés dont tu fais partie. As-tu réclamé cette Vie de Liszt que je
promets à mon entourage depuis 10 ans, quémandé ce post sur le clash Booba-La
Fouine sous l’angle des duels de pianistes, ce plaidoyer pour la réouverture des
maisons closes Belle Époque, ou mon ode la renaissance du cyberpunk ? Non je
ne t’ai pas entendu, sauf toi, @eronoele, et toi, @benmsnl.
J’aime
à croire que l’esprit de l’écrivain serait une sorte de capteur photosensible
qu’il suffirait de pointer vers l’extérieur pour qu’il s’imprime un texte digne
de vos yeux, parce que mon regard est unique, et en même temps, je suis humain
comme vous, ô mes semblables qui lisez ce post au péril de votre emploi de
consultant intérimaire en système d’infos. Les rêveries à rallonge de Proust
les yeux mis-clos, à la tombée de la nuit, à la lisière des rêves (j’ai lu les
trois premières pages de la Recherche) nous touchent parce que ce sont les
émotions universelles d’un animal humain qui sent, souffre et désire, sauf que
la plupart d’entre nous ne savent pas l’écrire… de la même manière que si j’éteins
les essuie-glaces de mon chalutier au milieu d’un tsunami, je verrai exactement
la même chose que Turner au réveil quand il va à la boulangerie, mais je ne
saurai pas le peindre.
Moi
blogueur, il y aura toujours de la place pour des informations douteuses,
fausses et biaisées, pour l’absence de documentation érigée en système et les
rapprochements brumeux, les intros qui font pschitt, les plans en une partie
sans idée-force, sans ligne de partage, sans ligne rouge ou verte. Moi
blogueur, la paresse, la procrastination et la mauvaise foi auront leur droit
de cité sur la Toile. Moi blogueur, le découragement, la dépression et la
dévalorisation de soi trouveront toujours une esthétique et un relais de
croissance. Moi blogueur, une plume baveuse masquera toujours l’indigence du
raisonnement, un poème pillé remplacera sans lustre la lyre hugolienne. Moi
blogueur, je n’aurai de cesse d’affirmer contre vents et marées que l’amitié
franco-allemande est soluble dans la colocation avec un cinglé, le recyclage
des bouteilles consignées, et qu’une guerre chimique pourrait toujours avoir
lieu pour des raisons gastronomiques.
Mais
moi blogueur, vous ne trouverez pas plus grand chantre de l’héroïsme
pianistique, meilleur rhapsode de l'écoute dy 1er concerto
de Medtner dans une Golf Essence à l'ombre des sapins noirs des Ardennes, quelque
part à la frontière belge, un soir de Novembre 2007. C’est pour ce type de
moments que mon blog existe. Pour ces pensées solaires de 15h37. C’est pour
regarder le fleuve vitreux qui me
traverse, y pécher des poissons d'or poétiques et vous les servir en bâtonnets d'adjectifs panés.
C’est pour oublier que vous faites un triple menton devant Outlook. C’est pour
oublier que le dernier livre que vous avez lu, c’était le mode d’emploi de
votre poupée gonflable. C’est pour oublier le flap-flap pathétique de la
chauve-souris de vos espoirs contre la vitre froide du Réel. Pour oublier que vos
idéaux ont sombré comme un uBoot rouillé dans le fjord glauque du pack Office.
Comme
le montre au quotidien un séjour en Allemagne, la vie d’un homme est une série
d’épreuves initiatiques qu’il convient de surmonter par la pratique régulière d’un sport-alibi et de l’écriture automatique.
Je
trempe donc ma plume dans du Jägermeister et j’y retourne.
genius
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